Tempus Fugit

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Ne pleure pas petite fille, toi aussi tu mourras, espérons-le calmement et entourée de tes proches, mais pour l’instant avale le temps, celui qui te gonflera en femme, en mère, en grand-mère, même si tu n’as pas d’enfant à faire vieillir et mourir.

Ne pleure pas petite fille sur celle qui ne fut pas toi ou qui le fut à travers toi. Elle s’est nourrie du temps que toi-même tu avales et a parcouru le même chemin que celui qui s’offre à toi, chemin que l’on découvre pas à pas, chemin que l’on a envie de dévorer en courant pour, plus tard, n’y cheminer que lentement, en espérant sa soudaine dérobée.

La vie, c’est le nom que porte le temps nourricier, est rarement autre chose qu’une boite hantée d’espérances, un escalier de sable dont les marches s’épuisent à te porter. Ne pleure pas petite fille, sans toi nulle vie ne peut prétendre à mourir et la mort est la certitude de la vie, celle que tu portes ou que tu pourrais porter.

Sans toi, petite fille la vie n’existe pas.

Avale le temps, petite fille, mais fais-le en gastronome, lentement, en en goûtant chaque seconde, en te laissant t’envahir de l’amoureuse langueur de ses illusions. Un jour ce temps si propice te précipitera dans l’oubli en te quittant et être avalé par une autre, qu’il nourrira à son tour, avant son abandon.

Le temps est un trou béant qu’aucun mot ne sautait décrire, aucune action ne saurait ralentir, que seule la vie peut vaincre le temps que le temps se lasse.