La vendeuse de fraise

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Pauino marchait depuis pas mal de temps sur le sentier fatalement poussiéreux et désolé de toute bonne histoire. Il marchait depuis pas mal de temps, mais avec un sacré mal de dent que Dentisnotaïstos lui avait flanqué pour avoir reluqué d’un peu près sa femme, vendeuse de fraises de son état et fortement enceinte depuis. Aïe aïe. La mâchoire déglinguée lui donnait des cauchemars.

Il voyait des trucs pas possibles et des mots curieux, qu’il répétait sans les comprendre, flottaient dans sa tête comme une comptine …. davier, précelle, Ostéotomes, scialytique et doigts divers ….. davier, précelle, Ostéotomes, scialytique et doigts divers ….. davier, précelle, Ostéotomes ….. Ces mots incompréhensibles rythmaient sa marche que le soleil, fatalement de plomb, ne rendait pas spécialement agréable.

Bon, il admettait avoir un peu charrié à trousser la fruiteuse directement sur son étal, écrasant les fraises dont la rougeur du jus allait si bien avec l’éclairage déclinant de cette fin d’après-midi … Dans un premier temps elle avait apprécié, lui aussi, ce rafraîchissement parfumé, mais l’extase passée ils convinrent que les fruits n’avaient plus le même pouvoir d’attraction, tout comme sa fraise à lui.

C’est là qu’arriva la brute et Pauino regretta de pas avoir des ailes, une seule lui aurait suffit pour s’extirper de cette coquille dans laquelle pataugeait son cul. La baffe qui suivit n’était pas que morale et lui donna, en plus de ses lancinantes douleurs stomatolocales, un bleu à l’âme bien plus difficile à effacer que les taches fragariales.