La première rencontre avec le travail de Rebecca CAMPEAU et spécifiquement avec cette grande composition dite « Marcel Proust au jardin » a été accompagnée par l’idée d’un son, d’une musique, d’un bruissement qui me fit penser à un monde aquatique, comme celui du fond chargé de plantes et de minéraux d’une rivière calme et claire, ou plutôt d’un ruisseau tant je ressentais la transparence de l’onde et le miroitage de la lumière dans la totalité de son lit. Là, il me semblait entendre l’eau jouer avec les herbes et les cailloux d’une urbanité qui ne pouvait que se regarder au risque de la perturber. L’effet ressenti était celui d’un onctueux mouvement que seule une attention soutenue permettait d’y dissocier les éléments de sa composition. Puis la sensation nourrit de la lente réflexion de l’inconscient et du rêve m’a amené aux coraux, à la barrière de corail, à la gigantesque variété des êtres qui la forment, à leur époustouflante répétition, à leur incroyable diversité. Aucune symétrie ni axe puissant, aucune image subliminale ni autres artifices d’une éventuelle paréidolie guident le parcours de l’œil, pourtant je ne suis pas perdu dans ce qui peut sembler un fatras d’objets en déroute, bien au contraire, car de-ci delà s’impose une forme, un cheminement, un élément, autant d’îlots de repos et d’élan qui sont les fondations d’une histoire sans cesse en mouvement. Il me semble difficile de réduire le travail de Rebecca CAMPEAU à une certitude, tant le glissement de l’idée qui pourrait la construire est liée à un détail qui soudain surgit, effaçant le précédent avant de tomber dans l’oubli.